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Rien de plus simple. Parce que Dumas a eu, en 1864, le flair du public… de 1895. Il a deviné ce que nous aimerions. Ce n’est pas lui qui est venu à nous, c’est nous qui avons été à lui. Ses personnages de femmes, Mme de Simerose et Balbine, sont le portrait anticipé de nos névrosées actuelles. L’Ami des femmes est une pièce d’aujourd’hui… mais faite par un homme d’autrefois, c’est-à-dire amusante, spirituelle et bien faite. De là, l’enthousiasme universel. Les deux générations y ont trouvé leur compte. Les hommes de jadis ont applaudi la forme, le tour, le talent ; la jeunesse présente a crié bravo aux idées, aux personnages même, et la réputation de l’auteur est montée jusqu’à la gloire.

Entendons-nous, pourtant : l’enthousiasme n’a pas été sans quelques sérieuses réserves. Des personnes considérables ont dit : « Sans doute, M. A. Dumas est un cerveau puissant, un auteur dramatique de premier ordre, et personne ne connaît aussi bien que lui le monde qu’il connaît ; mais personne n’ignore davantage celui qu’il ignore. Il n’a pas l’air de savoir ce que c’est qu’une véritable honnête femme. Cherchez dans son répertoire un rôle de jeune fille, de sœur, de mère, qui soit absolument