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On conçoit qu’un tel esprit ne s’arrêtât devant rien. Le scandale ne lui fait pas peur, il l’excite, il le tente ! Je me rappelle que, quelques jours avant la publication de l’Affaire Clémenceau, je me trouvais à dîner avec lui. « Eh bien, lui dis-je, croyez-vous à un grand succès ? ― Ce que ça va les faire gueuler !… » me répondit-il en riant. Je laisse au mot sa crudité, car il est typique. N’y voyez pas, de la part de Dumas, le désir de faire du tapage et le goût de la réclame ? Non ! C’est conviction profonde qu’il est dans le juste, qu’il est dans le vrai et qu’il faut faire cabrer le cheval pour le dompter plus sûrement. L’événement lui a donné raison. Il l’a dompté.

Il y a là un fait littéraire bien curieux.

Depuis cinq ou six ans, les pièces de Dumas, au lieu de se démoder, reviennent à la mode. Le Fils naturel, le Père prodigue, Monsieur Alphonse, repris à l’Odéon avec une interprétation relativement inférieure, ont eu un succès plus général qu’autrefois. Ce qui avait choqué ne choque plus. Ce qui avait plu, plaît davantage. Enfin, dernière preuve éclatante : au printemps dernier, l’Ami des femmes, presque tombé, il y a quelque trente ans, au Gymnase, a obtenu au Théâtre-Français un triomphe.