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père ! Qu’est-ce, en effet, que d’Artagnan, Porthos, Bussy, Chicot, La Môle, sinon le général noir, aux seizième et dix-septième siècles, c’est-à-dire le chevaleresque mêlé à l’héroïque ! Le fils a jeté sur la race un rayonnement de gaieté, de bonté, d’esprit, d’imagination ; c’est la gloire poétique greffée sur la gloire militaire ! La grâce française unie à la fougue africaine. Quel joli croisement de races !

Arrive enfin le troisième porteur du nom. Qu’a-t-il ajouté à l’héritage paternel et que doit-il à ses pères ? Il leur doit d’abord ce qu’il était à vingt ans. Plus rien d’un colosse, mais un grand garçon bien découplé, bien membré, agile, adroit, actif, la mine vaillante, la moustache retroussée, la lèvre souriante, moqueuse, un peu insolente, enfin… quelqu’un. Un seul trait détonne sur cette figure, c’est l’œil. On m’a raconté que, dans une ancienne famille, un vieux serviteur, venant rendre hommage à un petit baron né de la veille, le regarda attentivement et dit : « Çà, c’est la bouche de monsieur ! Çà, c’est le front de madame ! Mais ce nez-là n’est pas d’ici ! » Eh bien, j’en dirai autant de l’œil de Dumas. Globuleux comme pour voir de plus de côtés à la fois, observateur, inquisiteur, inquiet, se portant sans cesse