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ces trois personnes est un fait d’histoire littéraire très curieux. On dirait que les circonstances se sont chargées de faire l’éducation et de préparer la haute position de cet homme heureux. Chacune de ses facultés, prise à part, était distinguée sans être supérieure. Leur ensemble formait une supériorité.

Ses débuts au théâtre eurent lieu à un moment qui n’était guère favorable à ses comédies. Nous étions en plein romantisme ! Et, lui, qu’était-il ? Un héritier de Collin d’Harleville et d’Andrieux. Quelle figure allait faire sa muse modeste, mesurée, souriante, au milieu de ces effervescences et de ces luttes, dont quelques-unes allaient jusqu’à la bataille ? Il prit un parti assez singulier, il n’en prit pas. Au lieu de se mettre dans un des deux camps, il se mit dans tous les deux. Il applaudit avec passion Hernani, en continuant de choisir pour modèles, les Étourdis et les Châteaux en Espagne.

Était-ce calcul ? habileté ? manière de se ménager des amis des deux côtés ? Nullement. Il obéit à un sentiment très sincère et très personnel, à une sympathie d’intelligence, qui égalait sa sympathie de cœur ; il faisait bon accueil à toutes les œuvres remarquables, comme à tous les braves gens. Camille Doucet