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ordre et l’économie ; dans la législation, le respect des droits et des saines traditions ; de fermer la plaie des convulsions politiques, de relever les autels, et de retrouver, dans les décombres de l’ancien régime, les éléments d’une société nouvelle fondée sur les principes éternels de la raison. »

Un tel langage, dans une telle bouche, excita, parmi ceux qui l’écoutaient, un sentiment singulier. Nous nous regardions les uns les autres avec étonnement. Plusieurs d’entre nous trouvaient cet éloge excessif, mais nous en étions encore plus intrigués que choqués. Nous sentions qu’il y avait sous ces paroles autre chose que ces paroles mêmes, et nous démêlions mal cette autre chose.

Notre incertitude ne fut pas longue. Soudain, presque sans transition, l’orateur, par un contraste saisissant, aborda le 2 Décembre. Alors, avec une force d’autant plus grande qu’elle restait contenue, il fit un tableau implacable de ce nouveau coup d’État : il le montra débutant par les mitraillades dans la rue, procédant par l’expulsion de ce que la France comptait de plus illustre dans l’Armée, dans le Parlement, dans la Magistrature, dans la Presse, dans l’Académie, et poursuivant