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libérales le maudissaient comme un fléau, et le détestaient comme un despote.

Six ans plus tard, dans les derniers jours de mai 1824, une grande douleur se répandit sur presque toute la France. Beaucoup de familles prirent le deuil. Les personnes mêmes indifférentes gardaient le silence du respect devant un regret qu’elles ne partageaient pas. Quel évènement causait donc cette douleur ?... Qui pleurait-on ?... Napoléon !

Il était mort le 5 mai à Sainte-Hélène, et c’est l’annonce de sa mort qui jetait la désolation dans tant de cœurs. Un de ses ennemis les plus illustres et les plus ardents, Népomucène Lemercier, fondit en larmes en l’apprenant.

Comment expliquer un tel revirement dans l’esprit public ? Que s’était-il donc passé dans ces six ans, pour que l’homme, si haï en 1815, fût pleuré en 1821 ? Qu’y avait-il eu ? Il y avait eu... Sainte-Hélène !

M. Guizot m’a dit avoir tenu entre ses mains le cahier de géographie de Bonaparte écolier. Ce cahier, écrit tout entier de sa main, contenait l’énumération de quelques contrées de l’Afrique et se terminait par ce mot : « Sainte-Hélène, petite île ».

Certes, c’est un hasard bien saisissant que