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Une de mes parentes m’a souvent raconté qu’en 1813, étant assise aux Tuileries, sur la terrasse des Feuillants, elle vit passer l’Empereur en voiture découverte et revêtu de son costume d’apparat : toque avec des plumes, le diamant le Régent au bord de la toque, manteau de velours noir, dessous de satin, enfin en habit de théâtre.

Il se rendait au Corps législatif pour demander une nouvelle levée d’hommes...

« Eh bien, me disait-elle, le croiriez-vous ? la foule l’a accueilli avec des huées et des sifflets ! »

Deux ans après, en 1815, circulait dans Paris une lithographie qui faisait grand bruit. Cette lithographie était, je crois, d’Horace Vernet. Elle représentait une scène de labourage. On voyait dans un champ une charrue tirée par un âne ; une femme dirigeait la charrue, et un enfant conduisait l’âne.

J’entendais dire autour de moi : Voilà ce que Napoléon a fait de la France !... Il n’y a plus dans nos campagnes, ni hommes valides, ni chevaux ; il a tout dévoré ! Ce sentiment était celui de la haute et moyenne bourgeoisie presque tout entière. Le peuple et l’armée restaient fidèles à l’Empereur ; mais les classes élevées et