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jamais, n’était pas né grand versificateur. La preuve, c’est qu’il ne pensait pas en vers. Quelques-uns de ses manuscrits retrouvés nous le montrent ébauchant d’abord en prose, même de simples élégies ; y semant ça et là quelques hémistiches qui lui viennent d’inspiration et refondant ensuite le tout en un style homogène, mais dont l’homogénéité n’est que le résultat du travail, le produit d’emprunts faits de tous côtés. Je ne dis là que ce qu’il a dit lui-même. Le secret de son curieux travail nous est livré par lui, dans sa troisième épître à Lebrun. Il nous raconte en vers délicieux la peine que lui coûtaient ses vers et comment il prenait çà et là pour les faire. On dirait du oiseau construisant son nid. Il se compare lui-même tantôt à un fondeur

 
Qui forme son métal de cent métaux divers,
tantôt à un tailleur qui, par une couture invisible
Unit à son étoffe une pourpre étrangère,


Tantôt à un jardinier qui greffe des écussons sur ses arbustes :

 
Ma main avec adresse
Les attache, et bientôt même écorce les presse.


On ne peut pas mieux dire ; car, sous cette