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tandis que sa gloire à lui ait complétement péri ?

C’est ce que nous allons tâcher d’expliquer.

Pour tout écrivain, quel qu’il soit, poète ou prosateur, penseur ou homme d’imagination, il n’y a qu’un seul moyen non pas de réussir, mais de survivre, un seul, mais absolu, un sine qua non, c’est le style.

Le style est aux œuvres de l’esprit ce que l’alcool est aux corps organisés, il les conserve.

Il y a deux espèces de style, celui qu’on reçoit en naissant et celui qu’on se fait.

Quelques artistes de génie, les plus grands, je crois, naissent, pour ainsi dire, avec leur plume toute taillée dans leur main. Le travail l’affine, l’étude en perfectionne le maniement, mais l’instrument reste le même. Tels furent Corneille, Pascal, Molière, Fénelon, Mme de Sévigné, etc. D’autres, de grande race aussi, ne trouvent qu’à force de temps, d’étude, de comparaison, la langue de leur pensée, si je puis m’exprimer ainsi, la forme propre à mettre en pleine valeur leurs qualités poétiques.

J’en puis citer trois illustres exemples : André Chénier, Racine et La Fontaine.

André Chénier, poète de naissance s’il en fut