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Tartuffe, entre. A peine se voit-il seul avec elle, à côté d’elle, que sa convoitise l’emporte. Ses paroles, ses regards, ses gestes, tout entre en jeu. Sa main serre la main d’Elmire ; ses doigts se posent sur le genou d’Elmire : repoussée du genou, elle remonte à l’épaule, au cou, au fichu. Rien de plus joli que la façon dont Elmire écarte les mains, éloigne les aveux, détourne le sens des paroles. Mais Tartuffe n’est pas un homme qu’on arrête, et voilà que s’échappe de ses lèvres, avec une impétuosité mélangée d’artifice, cette déclaration, où s’amalgament, d’une façon si étrange, les élans de passion sincère, le jargon de sacristie, le mysticisme érotique, et qui se termine par ces vers d’un accent si humble et si touchant :

 
En vous est mon espoir, mon bien, ma quiétude,
De vous dépend ma peine ou ma béatitude ;
Et je vais être enfin, par votre seul arrêt,
Heureux, si vous voulez ; malheureux, s’il vous plaît.


Que répond Elmire ? Une déclaration si nette et si passionnée ne va-t-elle pas irriter cette femme de cœur ? l’effaroucher ? nullement ; c’est d’un ton calme et légèrement railleur qu’elle lui dit :

 
La déclaration est tout à fait galante ;
Mais elle est, à vrai dire, un peu bien surprenante.