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Je voudrais pouvoir citer ici quelques extraits de ces fortes harangues ; mais il serait impossible de le faire sans donner à cette biographie une certaine couleur politique, que je désire éviter par-dessus tout.

Lisez également ses discours sur la question des écoles du Nouveau-Brunswick, sur le soulèvement des Métis au Nord-Ouest, sur la question Riel, sur la restitution des biens des Jésuites, sur l’autonomie des provinces. Partout, c’est la même largeur d’idées, le même souffle puissant et soutenu, la même érudition qui embrasse le sujet dans son ensemble et le saisit à la fois dans tous ses détails.

Écoutez-le, quand il traite la question des biens des Jésuites ; je prends au hasard :

« On a basé la prise de possession sur le droit de conquête. Par cette déclaration, on violait les engagements pris par les capitulations et le traité de Paris. Si le principe posé dans ce bref de possession est un principe juste en droit naturel et en droit international, il ne serait pas seulement juste pour les corporations religieuses, mais il devrait encore être juste pour les particuliers. Or, M. le président, quel n’aurait pas été le cri de rage — et bien légitime — de la part de n’importe quel habitant de ce pays dont les propriétés auraient été confisquées après la conquête, — que n’auraient pas fait nos bons habitants des campagnes, si, en vertu du droit de conquête, on était venu leur dire : « Nous prenons possession de vos biens ; nous prenons possession de ces terres qui appartiennent à la couronne par droit de conquête ? » Il y aurait eu un long cri de douleur et de protestation dans toute la province. Ce cri aurait été entendu en Europe et, malgré la décadence du gouvernement français à cette époque, il aurait été écouté en France. On aurait dit : « Vous violez le traité de Paris et les capitulations ; vous n’avez pas le droit de confisquer, en vertu de la conquête, les biens des particuliers. » Et, si cela ne se fait pas quand il n’y a pas de conventions, cela doit se faire encore moins quand il y a des conventions.

« Ce que l’on ne pouvait pas faire contre de simples particuliers, contre des hommes qui, en définitive, pouvaient se défendre, prendre les armes, exposer leurs griefs, se protéger dans les assemblées publiques, provoquer un mouvement politique ; ce qu’on ne pouvait faire contre des hommes placés dans ces conditions, on aurait pu l’exécuter contre de pauvres religieux sans défense, contre des hom-