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fille qu’il aimait, ignore que celle-ci s’est laissée mourir de chagrin. Il revient, après quelque temps d’absence, dans la ville où elle est morte et rencontre, par les rues, un convoi virginal. Il s’approche curieusement, demandant quelles sont ces funérailles, et apprend qu’il se trouve devant le cortège de celle qui fut sa bien-aimée. Il devine le drame qui s’est accompli le désespoir le saisit — car il n’a pas cessé d’aimer, malgré l’apparence contraire ; — il cherche à rejoindre dans la mort celle qui l’avait assez aimé pour renoncer à vivre après son abandon. La concordance des éléments est complète : aucun trait ne manque au parallélisme. Il importe de noter encore que, des deux côtés, une reine éplorée et sa cour suivent le convoi.

Mais poursuivons plus à loisir la comparaison des détails concrets. Le cortège arrive : entrent en procession des prêtres, puis le corps d’Ophélie, suivi par Laertes et par des pleureurs, le Roi, la Reine, leurs suites.

Dans la première rédaction (1603), Hamlet arrive, et apercevant le convoi, prononce ces paroles :

Quelles sont ces funérailles dont toute la cour se lamente ? Il faut que la morte soit d’une noble famille. Tenons-nous à l’écart un moment[1].

Qu’on veuille bien relire le récit de Marguerite reproduit plus haut : l’attitude est exactement la même, les réflexions sont semblables. La question

  1. Ces paroles caractéristiques manquent dans la seconde rédaction (1604).
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