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sont passés à ce même moment et dans ce même milieu, il ne se serait pas déroulé une histoire d’amour qu’il y aurait lieu de rapprocher de celle que rappelle Catherine dans Peines d’Amour perdues.

Or, le premier auteur que l’on songe tout naturellement à interroger sur ce point, c’est à coup sûr la reine Marguerite qui, toute sa vie, se montra și avide de telles aventures et se plut à en narrer de pareilles dans ses précieux Mémoires. Ouvrons ces pages si vivantes et lisons l’épisode du « voyage en Brabant » et au pays de Liège que nous venons d’évoquer il y a un instant. Qu’y trouvons-nous ? Précisément, l’une des plus poignantes histoires d’amour de la fin du xvie siècle et, ô miracle ! si voisine de celle dont fait mention la comédie shakespearienne, que l’identité de l’une et de l’autre ne saurait faire aucun doute. C’est bien l’histoire de celle que « l’amour rendit si mélancolique, triste et morose », qu’elle en mourut. D’un côté comme de l’autre, il s’agit d’Hélène de Tournon, fille de la dame d’honneur de la reine Marguerite[1] et qui, au moment où les faits se passent, vivait avec sa mère, à la cour de cette princesse, après avoir appartenu quelque temps à la maison de Catherine de Médicis. Nul doute que toutes les personnes qui fréquentèrent à cette époque le château de Nérac ou celui de Pau ne l’aient entendu souvent raconter par

  1. Il est tout à fait logique que la comédie shakespearienne fasse de la fille une sœur de la dame d’honneur, puisque l’allusion quelque peu agressive qu’amène l’évocation de cette mort n’aurait pu être adressée, sans quelque chose de choquant, à la mère de la jeune fille.
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