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exceptionnel et, à tous égards, saisissant, de cette aventure passionnelle du temps de la Renaissance. Le poète averti avait-il aussi entrevu l’étrange analogie qui se révèle entre ces faits historiques et certains traits essentiels de l’épisode d’Ophélie dans le drame d’Hamlet ? Nous l’ignorons. Il semble, cependant, qu’aucun lettré ne saurait méconnaître cette ressemblance frappante. Comment ne pas apercevoir, dès lors le problème d’histoire littéraire que pose la comparaison des deux textes ? Et si un lien véritable apparaît entre le récit de la reine Marguerite et les circonstances de l’amour et surtout de la mort de l’héroïne shakespearienne, une clarté nouvelle ne pourrait-elle jaillir d’une telle constatation en ce qui touche les origines, encore mystérieuses, de la célèbre tragédie ? Mais de quelle manière établir les rapports de l’histoire vécue et de la fiction, à travers les trois siècles et demi qui nous séparent des événements ?

Le mieux sera sans doute de demander quelque lumière aux œuvres shakespeariennes elles-mêmes.

Il est justement une pièce, considérée par tous les critiques comme l’une des premières en date — sinon la première de toutes[1] — du merveilleux théâtre, dont la scène se déroule d’un bout à l’autre à la Cour de Navarre. Il s’agit de la charmante comédie qui porte ce titre : Peines d’Amour perdues (Loves Labour’s Lost). Le roi qui y figure n’est autre que le roi Henri de Navarre, notre futur Henri IV, alors que la princesse de France, — l’autre

  1. On en place, en général, la composition vers 1589 ou 1590.
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