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pour contenter son envie elle me preparoit à mon retour ; dont le premier fut que soudain que le bateau commença [à Namur, sur la Meuse,] à s’esloigner du bord, Madamoiselle de Tournon, fille de Madame de Tournon, ma Dame d’honneur, Damoiselle très-vertueuse et accompagnée des graces que j’aimois fort, prit un mal si estrange, que tout soudain il la mit aux hauts cris pour la violente douleur qu’elle ressentoit, qui provenoit d’un serrement de cœur, qui fut tel que les medecins n’eurent jamais moyen d’empescher que peu de jours après que je fus arrivée à Liege, la mort me la ravist. J’en diray la funeste histoire en son lieu, pour estre remarquable.

Voici le récit complet qui se rencontre un peu plus loin :

Cette arrivée, toute pleine d’honneur et de joye, eust esté encor plus agreable sans le malheur qui arriva de la mort de Madamoiselle de Tournon, de qui l’histoire estant si remarquable, je ne puis obmettre à la raconter, faisant cette digression à mon discours. Madame de Tournon, qui estoit lors ma Dame d’honneur, avoit plusieurs filles, desquelles l’aisnée avoit espousé Monsieur de Balançon, Gouverneur pour le Roy d’Espagne au Comté de Bourgogne, et s’en allant à son mesnage, pria sa mère Madame de Tournon de luy bailler sa sœur Madamoiselle de Tournon pour la nourrir avec elle, et luy tenir compagnie en ce païs où elle estoit esloignée de tous ses parents. Sa mère la luy accorde ; et y ayant demeuré quelques années en se faisant agréable et aimable (car elle estoit plus que belle, sa principale beauté estant sa

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