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sections à une « Fête du Travail » qui doit avoir lieu au Champ de Mars, le dimanche 16 avril.

À cette fête, le gouvernement passera les sections en revue et leur distribuera les outils vainement réclamés jusqu’alors.

À peine la convocation lancée, les délégués de tous les clubs au club central décident de participer à cette fête et d’y convoquer leurs adhérents.

Comprenant alors que la manifestation peut tourner contre lui, le gouvernement qui l’avait imaginée prétend la contre-mander. Mais les délégués des ateliers persistent dans leur intention de se rendre au Champ de Mars le jour indiqué.

Il ne fait ainsi plus doute pour personne que c’est une nouvelle « journée » qui se prépare.

On apprend en effet que Changarnier, général tout dévoué aux d’Orléans, a été mandé secrètement par Lamartine et Ledru Rollin, et qu’on lui a offert le commandement en chef de la garde nationale, le vieux Courtais, son chef actuel, n’inspirant pas assez de confiance.

Mais il paraît que l’accord n’a pu se faire, Changarnier ayant exigé avant tout le rétablissement des anciennes compagnies d’élite.

Quelques socialistes connus, Pierre Leroux et Thoré, entre autres, voulant éviter la guerre civile, vont trouver Ledru-Rollin et le supplient de ne pas faire battre le rappel contre la manifestation qui n’a en somme d’autre but que d’enrayer les menées réactionnaires.

Non seulement Ledru-Rollin reste sourd à ces supplications, mais la discussion s’échauffant, il laisse échapper ces paroles significatives : « Nous voulons en finir avec les socialistes ! »

Le lendemain de cette scène, sous un soleil éclatant le plus grand nombre de sections d’ateliers, groupées d’abord à leurs habituels rendez-vous, arrivent de tous côtés, au Champ de Mars et s’échelonnent sur les divers points que leur désignent des prisme indicateurs