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Cette commission, présidée par Louis Blanc, se composera de délégués choisis par les corps de métiers pour recueillir les vœux « des ouvriers, afin qu’ils soient promptement réalisés ».

La proclamation se termine par la plus touchante des tirades :

« Le gouvernement vous aime ; ayez confiance en lui et sachez bien qu’il est presque plus impatient que vous-même de votre bonheur ».

Presque est, en effet, une prudente réserve ; ainsi s’expriment ceux qui savent déjà ce que vaut ce genre de promesses.

Enfin le gouvernement annonce encore l’ouverture d’ateliers nationaux où trouveront à s’occuper les nombreux ouvriers actuellement sans travail, la plupart des usines étant fermées. Ils pourront ainsi attendre la prompte réalisation de leurs vœux par la commission du Luxembourg.

Quant aux jeunes gens, ils ont la ressource de s’enrôler dans les bataillons de la garde nationale mobile, créés pour « défendre la République ! »

Contre qui ? puisque cette République veut — elle aussi — la paix à tout prix.

J’ai cependant quelque velléité de m’y engager. Mais, sur le conseil de mon père, et de quelques vieux amis, je ne donne pas suite à ce projet. J’attends d’être mieux fixé sur l’emploi qu’on fera de cette garde mobile. Cependant, comme il me faut gagner quelques sous, je me fais inscrire dans une escouade des Ateliers nationaux, dont je suis promu chef par élection.

Malgré ses allures ultra-pacifiques à l’extérieur, cédant sans doute à la manie du jour, qui a poussé jusqu’aux étudiants à réclamer un uniforme et le droit de porter l’épée — comme les élèves de l’École normale supérieure — le Provisoire a donné une organisation militaire aux Ateliers.