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dans ces réunions et déclaraient à qui le voulait entendre qu’ils se garderaient bien de le faire : lâcheté et calomnie sont sœurs jumelles.

Quant aux journaux, depuis le rouge le plus foncé jusqu’au blanc le plus pur, ce fut bien pis encore.

La physionomie des réunions y fut rendue grotesque à plaisir. De prétendus écrivains ne rougirent pas de s’atteler à la triste besogne d’altérer sciemment ce qui s’y disait d’utile et de relever avec soin ce qu’il pouvait y avoir de défectueux ou de puéril dans le langage de certains orateurs peu exercés à parler en public.

Enfin tous ceux qui y prirent la parole furent dénoncés, par les journaux royalistes et conservateurs, comme subversifs de tout ordre moral et social ; par les journaux prétendus républicains, comme des « endormeurs, » chargés par le pouvoir d’alors de détourner les travailleurs de l’action révolutionnaire (sic) !

Les journaux de toutes nuances s’accordèrent d’ailleurs pour inviter leurs lecteurs à faire le vide autour de ces réunions, réputées dangereuses et malsaines.

Il y avait quelque logique, il faut le reconnaître, dans cette attitude de tous les journaux à l’égard des réunions publiques.

La presse a joué jusqu’ici en France un rôle considérable. La réglementation fiscale dont elle est l’objet, eu en interdisant, l’accès aux travailleurs, la constitue à l’état de monopole entre les mains de la bourgeoisie et en fait une puissance véritablement créatrice et seule directrice de l’opinion.

« Silence aux pauvres ! » s’était justement écrié Lamennais en 1848, lors du rétablissement du timbre et du cautionnement.

Dans les États au contraire où le droit de réunion est reconnu et pratiqué, il va de soi que l’opinion résulte directement de la pratique de ce droit et que la presse se trouve ainsi réduite à un simple rôle de constatation de cette opinion. Elle ne dirige plus ; elle