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En même temps, vous vous montriez, dans votre journal, partisan des idées de liberté, de modération et de conciliation.

Votre jeu est facile à deviner : vous ménagiez, d’une part, votre popularité pour le cas où le peuple serait victorieux, et, d’autre part, vous vous réserviez une porte dérobée pour échapper aux persécutions, dans le cas du triomphe de Versailles.

C’est plus que de l’habileté, cela, citoyen Félix Pyat…

Ma jeunesse a le droit et le devoir de le dire à vos cheveux gris. Et, dans les circonstances actuelles, quand on porte votre nom, une telle duplicité est un crime.

Vous venez d’y ajouter celui de désertion devant l’ennemi.

Voilà ce qui m’a déterminé à vous infliger publiquement une leçon de moralité politique et j’ai tenu moi-même la main à ce que mon observation fût publiée à l’Officiel.

Je pense que cela suffit pour édifier le public sur vous et sur moi.

D’ailleurs, le mot de la situation a été dit par le citoyen Delescluze, l’autre jour à la séance de la Commune, sous l’impression encore toute récente de votre démission.

« Croyez-vous donc, s’est écrié Delescluze, que tout le monde approuve ce qui se fait ici ? Eh bien ! il y a des membres qui, malgré tout, sont restés et resteront jusqu’à la fin, et, si nous ne triomphons pas, ils ne seront pas les derniers à se faire tuer soit aux remparts, soit ailleurs. »

Ces paroles du citoyen Delescluze sont doublement accablantes pour vous, citoyen Félix Pyat.

Mais c’est sans doute parce que vous vous sentiez incapable de payer de votre personne, que vous avez cru devoir vous retirer, modestement, avant la victoire.

Vous avez l’air, en terminant votre article du Vengeur, d’en appeler aux électeurs du dixième arrondissement, et au conseil de la dixième légion.

Je ne veux pas abuser de mes avantages. Je ne vous mettrai donc pas au défi de marcher à la tête de la dixième légion la première fois qu’elle ira au feu, mais, pour rester dans la mesure de vos moyens, je vous mets au défi de vous présenter devant une réunion publique de vos électeurs.

A. Vermorel.
(Extrait du Cri du Peuple, 28 avril 1871.)