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pour vous approprier une fortune considérable, car c’est là une de vos plus savantes manœuvres compliquées de faux et d’escroquerie ; mais je ne veux pas interrompre l’exposition de l’interminable série des actes frauduleux dont vous avez rempli les greffes et les sacristies.

Voici d’abord l’acte de mariage de la jeune Gabrielle Vernier, reconnue par vous la veille du jour où vous saviez qu’une succession allait lui échoir.


NEUVIÈME PIÈCE.

Préfecture de la Seine. — Extrait du registre des actes de mariage du 8e arrondissement.

Le 17 juillet 1867, à 10 heures du soir, acte de mariage de P… M… Delrio… et de Gabrielle-Marie-Cécile Favre, sans profession, née à Paris, le 22 novembre 1845, y demeurant avec son père, rue d’Amsterdam, No 87, fille majeure de Claude-Gabriel-Jules Favre, avocat, membre du Corps législatif et de l’Académie française, âgé de 57 ans, présent et consentant, et de Jeanne Charmont dont l’existence est ignorée.

Cet acte, entaché de faux comme tous les autres, a cependant un caractère plus décidé ; on y voit que l’habitude vous a tout à fait familiarisé avec la fraude ; vous dédaignez les timidités aux-quelles vous avez quelquefois cédé dans les actes antérieurs, et vous êtes désormais parfaitement préparé aux audaces des manœuvres frauduleuses et compliquées de faux que vous pratiquerez contre la république et ses défenseurs.

Ainsi, dans l’acte du 17 juillet 1867, vous ne déguisez plus vos qualités sous le titre banal de propriétaire, vous les étalez, au contraire, avec complaisance. Ensuite, on ne parle plus de l’acte par lequel vous vous êtes attribué la paternité de cette jeune fille, vous en êtes carrément le père. Le père qui marie sa fille, c’est M. Jules Favre, avocat, membre du Corps législatif et de l’Académie française.

Le mère y est désignée aussi peu que possible ; toutefois c’est toujours Jeanne Charmont, mais l’officier de l’état-civil, s’étonnant de ne pas la voir pour donner son consentement, s’informe de la cause ne cette absence, et vous lui répondez avec votre assurance imperturbable : On ne sait ce qu’elle est devenue ; en conséquence, on écrit dans l’acte : Son existence est ignorée, et l’on passe outre !

Je ne méconnais pas l’habileté de cette manœuvre compliquée