La journée du lendemain se passa sans apporter aucun changement. Nous étions toujours couchés. Chaque fois qu’un de nous faisait mine de se lever, les balles sifflaient au-dessus de nos têtes !
Ce n’était rien alors : mais quand la nuit vint, une pluie abondante tomba et continua sans cesse.
Quand le jour se fit, le tableau qui s’offrit à nos yeux fut terrible : il y avait au milieu de ce tas de boue des taches de sang et des morts, des blessés sans secours ; c’était horrible !
Un grand bruit me tira de ma torpeur. Il grandit et un autre bruit parut lui répondre. Bientôt je fis comme les autres : je regardai.
Cela dura cinq fois vingt-quatre heures ; après quoi, appelé par ordre alphabétique, je comparus enfin devant un officier.
Il me renvoya ; le lendemain, embarqué à bord d’un train de voiture à bestiaux, je roulai vingt-deux heures !
J’avais perdu tout sentiment du jour et de la nuit. Quand je sortis de là, je ne savais si le jour se levait ou si la nuit allait baisser.
Quatre mois de captivité (extrait du Gaulois du 21 septembre 1871).