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Enfin, dernier détail — le plus concluant celui-là — et qui prouve l’intention évidente de ne point faire de prisonniers.

Depuis quinze jours, le gouvernement de Versailles s’attendait à son triomphe, et, puisqu’il avait solennellement juré de faire respecter la loi envers les vaincus, il semblerait tout naturel qu’il eût préparé, non les moyens de les loger ni de les nourrir, — nous n’en demandons pas tant, — mais les moyens de les juger. Or, il est avéré que l’organisation des Conseils de guerre, insuffisante encore à cette heure, de même que la nomination des magistrats civils, chargés d’instruire par catégories, n’ont été faites que plus de quinze jours après la fin de la lutte, et même à présent, reconnaît-on qu’il sera presqu’impossible de juger tous les prisonniers, et est-il question, bien bas encore, il est vrai, de déporter le reste en masse !

Pourquoi faut-il que les bras fatigués des soldats, que la satiété du meurtre et aussi les mitrailleuses mises hors de service par leur incessante et horrible besogne, n’aient pas permis de réaliser le rêve de nos vainqueurs : n’avoir pas de prisonniers à juger !

Ces faits ne suffisent-ils pas à démontrer au lecteur le mieux disposé en faveur de M. Thiers, que nous ne l’avons calomnié ni lui ni les siens, en affirmant qu’il y avait parti pris d’extermination sur place… afin de tenir ainsi la parole donnée de « ne point interrompre le cours des lois ? »

Et à quoi bon calomnier, d’ailleurs ? Bien maladroit, vraiment, serait celui qui calomnierait Versailles à ce propos ! Les crimes réels, avérés, glorifiés par les assassins eux-mêmes, parlent assez haut pour qu’il soit suffisant de les rappeler et de les énumérer seulement.

Ce qui différencie, en effet, les massacreurs de mai 1871 de ceux de juin 1848, c’est qu’autant ces derniers, une fois leurs crimes commis, déployèrent d’habileté à les dissimuler, autant les premiers ont mis de forfanterie à les étaler au grand jour.