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Vermorel la tint plus noblement encore que s’il l’eût donnée en public.

Sa conduite constante, à la Commune, fut celle d’un homme prêt à tous les sacrifices et à toutes les mesures réellement énergiques que nécessiterait la lutte engagée par Versailles, mais décidé aussi à s’opposer de tout son pouvoir à d’inutiles violences que son intelligence lui faisait considérer comme contraires et même nuisibles au but que s’en proposaient ceux qui les voulaient commettre.

Dans la nuit du 22 au 23 mai, que nous passâmes ensemble à Montmartre, nous échangeâmes mutuellement les impressions que nous causait le peu d’ensemble et de netteté des mesures prises pour la résistance, et nous nous convainquîmes de la certitude de la défaite.

— « Mes pressentiments ne me trompaient point lorsque je quittai ma mère pour revenir à Paris, » me dit-il, « je ne sortirai point vivant de la lutte. Mais qu’importe, l’essentiel est de remplir jusqu’au bout le mandat que nous avons accepté. »

Le matin du 23, nous dûmes nous séparer. — Nous venions d’apprendre que les buttes Montmartre étaient tournées et que l’ennemi occupait la porte Ornano.

L’artillerie de Montmartre manquait, nous dit-on, de munitions, et il fallait qu’on lui en envoyât en toute hâte. Vermorel monta à cheval (il n’y avait monté de sa vie), descendit au galop vers l’Hôtel-de-Ville et, au risque de payer cher son apprentissage de cavalier, disparut bientôt à nos yeux ébahis de cette espèce de tour de force.

Pour moi, je regagnai mon arrondissement (4e), non sans entrer toutefois à la mairie du 10e arrondissement, faubourg Saint-Martin, où j’avertis l’administrateur délégué, l’excellent citoyen Leroudier, de l’urgence qu’il y avait de mettre promptement en état de défense les faubourgs St-Martin, St-Denis, et le bou-