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Le second Comité dont les membres avaient été choisis à l’avance par la majorité, qui s’était retirée dans une salle voisine de la salle des séances, et où il fallut l’aller chercher, pour qu’on pût procéder au vote régulier, se composa des citoyens Ranvier, Gambon, Ant. Arnaud, Eudes et Billioray.

À peine installés, le citoyen Eudes déclara à la Commune que le Comité de salut public, rentrant dans la lettre du décret du 1er mai et s’en référant à l’interprétation qu’un des membres de la minorité en avait donnée, entendait à l’avenir disposer de tous les pouvoirs que lui conférait l’article 3 du décret.

La comédie dont le scénario avait été tracé à l’avance par le citoyen Félix Pyat, avait atteint son but[1]. On avait réussi à faire voter la minorité pour la formation du Comité de salut public qui, cette fois, était, en apparence au moins, l’expression de la majorité de la Commune, dont la totalité des membres avaient pris part à l’élection.

C’était là un acte véritablement immoral et digne des roueries de la politique parlementaire, dont nous préférons de beaucoup avoir été dupe plutôt que complice.

De ce moment, en présence d’un tel manque de loyauté si formellement constaté, les membres de la minorité durent songer — non à se retirer, personne n’y pensa un seul instant, — mais à dégager dans le seul intérêt de l’avenir de l’idée communaliste, prête à sombrer, la moralité des motifs qui la contraignaient à décliner, au nom de la Révolution sociale, la part de responsabilité que venait de leur créer leur apparente adhésion à l’institution du Comité de salut public, contre laquelle ils s’étaient élevés dès le principe.

  1. « Les avons-nous assez roulés ! » disait, après avoir levé la séance, le citoyen Pyat, désigné par la majorité comme président des débats, « et que dites-vous de la façon dont j’ai dirigé l’affaire ? » ajoutait-il en s’adressant à quelques amis restés les derniers dans la salle des séances et parmi lesquels je me trouvais, malheureusement pour cette petite révélation du citoyen Pyat, qui ne m’avait point aperçu et se croyait entouré de ses seuls confidents.