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Jour, Auteoil, Passy, les abords du Ranelagh rendus complètement inhabitables, leurs maisons brûlées et jonchant littéralement les rues de leurs débris ! Enfin l’Arc-de-Triomphe, grâce à ce « grand historien de nos gloires nationales » (style consacré pour désigner M. Thiers), l’Arc-de-Triomphe portait déjà, sur la façade ouest, la trace de plusieurs milliers d’obus !

Et M. Thiers qui, depuis le 2 avril, avait ordonné ces effroyables ravages ; qui faisait massacrer les prisonniers par les soudards de l’ex-empereur, qui déjà avait arrêté ses projets d’atroces vengeances contre les deux cent mille partisans de la Commune, M. Thiers poussait l’impudence et l’ironie jusqu’à proclamer, le G mai, qu’à la condition de livrer Paris, il ne serait fait aucun mal aux habitants et qu’il ne bombarderait pas la ville !

Si Cavaignac, d’odieuse mémoire, vivait encore, combien il souffrirait dans son amour-propre de bourreau : son pardon à a des frères égarés n’était vraiment une bien enfantine tartufferie, auprès de celle du Benjamin des ruraux.

Malgré ces appels à la trahison, le courage des fédérés grandissait en raison même de l’accumulation des obstacles à surmonter, et leur enthousiasme ne pouvait céder même devant les plus cruelles souffrances.

Il nous souvient à ce propos, qu’étant allé visiter, à Passy, l’ambulance qu’y avait fait installer précédemment le gouvernement du 4 septembre, nous causions avec le Dr De Marquay, chirurgien en chef de cette ambulance, et nous lui témoignions les craintes que nous inspiraient certains blessés qui avaient dû subir de dangereuses opérations. Ce chirurgien dévoué et d’une sincérité bien rare à notre époque, après avoir déclaré que ses convictions lui interdisaient de désirer le triomphe de notre cause, nous rassura sur nos craintes, ajoutant qu’il basait ses espérances de succès sur ce fait que « jamais il n’avait vu conserver » plus de calme et de sang-froid chez les blessés qu’il