Page:Lefrançais - Étude sur le mouvement communaliste à Paris, en 1871.djvu/131

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 125 —

le pays des malheurs qui en devaient ressortir, débutait par les précipiter et les rendre inévitables, en témoignant dès ses premiers actes qu’elle n’était que le trop fidèle écho des rancunes qui l’avaient élue.

Ce n’est point pourtant que nous entendions rendre les paysans seuls responsables des effets de l’aveugle haine qu’on leur a inspirée contre les ouvriers des villes.

Nous savons trop que, livrés à l’isolement par la nature même de leurs travaux ; privés de par les lois et règlements de police sur la librairie et le colportage, de toute lecture qui les puisse éclairer sur la politique de leur pays et sur leurs véritables droits, ils ne peuvent connaître la valeur réelle des institutions sous lesquelles ils vivent[1].

Nous savons trop également que, propriétaires nominaux pour la plupart du champ qu’ils labourent et qu’ils fécondent, ils sont en fait les serviteurs passifs de la rente, de l’usure et de l’impôt, dont les agents sont pour eux d’insupportables tyranneaux. Enfin nous comprenons trop que, mis en contact avec les grandes villes, les splendeurs qu’ils y contemplent, tout le luxe qui s’y étale à leurs yeux leur rappellent avec amertume qu’ils sont chargés d’y pourvoir par leurs rudes labeurs et au détriment de leur propre bien-être.

Nous ne comprenons que trop tout cela. Mais que les prolétaires des campagnes ; que tous ces petits propriétaires constamment courbés sur le champ qui, toutes redevances payées, leur donne à peine de quoi ne pas mourir de faim, que tous ces maltraités du travail y songent : leurs misères ne sont pas supérieures à celles des travailleurs des villes qui, comme eux et dans de pires conditions, suent sang et eau pour entretenir le luxe insensé qui les irrite.

  1. Qui ne sait par exemple que les romans populaires de MM. Erckmann-Chatrian, (Mme Thérèse, — le Conscrit de 1813, — Waterloo) n’ont jamais pu obtenir d’être estampillés par la Commission de Colportage, alors que l’estampille était accordée sans difficulté aux productions littéraires les plus malsaines, et les plus dépourvues de goût, ainsi qu’aux chansons de la plus révoltante obscénité.