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Je voudrais, en affronts, lui payer, cris pour cris,
Tous les mots de bonheur, que l’amour m’a surpris :
Et, comme de serments, changeant d’enthousiasme,
Retourner, dans son sein, le poignard du sarcasme.
Voilà mon rêve ! Eh bien ! si je la rencontrais,
Que j’ai pitié de moi ! je lui pardonnerais.
J’irais, à ses genoux, redemandant l’aumône,
User mon sang d’esclave à rebâtir son trône :
Et, honteux de moi-même, en pleurant dans ses bras,
Lui dire sur le cœur : Ne m’abandonne pas.

Je ne connais que trop ma déplorable force :
Il me faut, cette fois, un éternel divorce ;
Je l’ai déjà quittée, et je sais qu’un sanglot,
Un geste reconnu, son sourire, un seul mot,
Ramènerait ma tête à son pli de torture.
Je ne veux plus risquer de perdre ma rupture.
J’ai déjà trop maudit ma flasque humilité,
Ma souplesse à traduire, en sensibilité,
Des grimaces du cœur l’infâme afféterie.
Tu te souviens du jour, où toute la patrie,
Se gonflant sous les fers de la captivité,
Déborda noblement contre la royauté ?
C’était ma cause, à moi, fils de la république,
Dont ma bouche a sucé le lait démocratique !
Je devais, à mon rang, combattre en citoyen.
Acteur efféminé, je n’y vis qu’un moyen