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SOMNORAMA.

Quand on est détrompé, quand la vie a menti,
Quand on pleure, en lisant tout ce qu’on a senti,
Tous les jours, et longtemps, que faire ? La tristesse,
Comme un joug venimeux, nous courbe à la paresse.
Au travail qui console on voudrait se livrer,
Et l’on ne peut agir, on aime mieux pleurer.
Puis bientôt, maudissant ces larmes meurtrières,
Qui dessèchent notre âme, en brûlant nos paupières,
On aspire au repos, à la nuit, au sommeil :
Et la nuit, on regrette, on attend le soleil,
Comme si l’on croyait qu’un rayon de lumière
Doit rendre le bonheur moins sourd à la prière.
C’est un destin qui tue, et l’on n’en peut mourir :
La mort, quand il le faut, ne sait pas secourir.
On craint, en l’avançant, de passer pour un lâche ;
Sans en rien retrancher, il faut vivre sa tâche.
On n’a pas toujours là des périls à tenter,
Ou la guerre est si loin, qu’on ne peut s’y jeter ;