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» Comme un souffle des cioux, voltige sur ma tête : » Viens reprendre mon âme au monde qui l’arrête. » Reçois-moi, la première, au seuil du paradis : » N’entrons pas, divisés, sous l’or de ses parvis. » Oh ! viens : que ta présence, invisible et sacrée, » Presse en moi de la mort la lenteur égarée ! » Te voilà !… je le sens… le poison I’obéit, » Et ton linceul de glace en dedans m’envahit. » Mon sang, ivre de froid, en frissons s’évapore. » Pose-toi sur mon cœur, pendant qu’il bat encore : » Qu’il batte en s’éteignant, comme il battit toujours ! » Nous n’avons pas, hélas ! pu mêler tous nos jours ; » Mais nous pouvons au moins marier notre cendre. » Accours, accours du ciel, si tu peux en descendre : » Que Roméo se meure, en s’appuyant sur toi ! » Attends-moi, Juliette ! ô mon ombre, attends-moi ! »
Changez en sons plaintifs ces transports d’harmonie,
Qui le font, à nos yeux, rayonner d’agonie :
Et voyez si son âme, ivre de défaillir,
Dans son ciel funéraire ira s’ensevelir !
Que la musique pleure, et vos larmes tarissent.
Autant vaudraient des vers : et quels versattendrissent ?
Plus ils paraissent beaux, et moins ils font pleurer.
C’est Roméo joyeux, qui peut seul nous navrer :
Courbé sous un exil, dont la tombe délivre,
Si vous voulez qu’il pleure, ordonnez-lui de vivre.