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Le songe se transforme, en se réalisant :
Son éclat, moins trompeur, est aussi moins puissant ;
Un voile inaperçu gêne sa transparence :
Nulle faveur du sort ne vaut son espérance.
Rendons grâce pourtant, aux destins inhumains,
Des éclairs fugitifs, qui dorent nos chemins :
L’espoir, le plus souvent, l’illusion s’envole,
Sans qu’un rayon d’adieu dans la nuit nous console.
Enfants, qui découpons l’image du soleil,
Nous lançons dans les airs notre jouet vermeil,
Et nous suivons des yeux, jusqu’au seuil d’un nuage,
L’astre huriolé, qui plonge dans l’orage.
Quand il a disparu, nous sentons son essor
Tirer le fil tendu, qui le retient encor ;.
Puis, pour naviguer seul, il rompt son faible câble,
Et, comme notre espoir, son vol irrévocable
Se perd, et ne nous laisse, en fuyant son soutien,
Qu’un peu de fil mêlé, qui n’attache plus rien.
Que m’ont laissé de plus mes chimères aimées ?
Le souvenir confus de les avoir formées.
Que de fois ces leçons, que j’attendais toujours,
Ont, pour moi, duprintemps, noirci les plusbeaux jours :
Et combien j’ai de fois vu l’astuce ou l’envie
Brouiller le fil flottant, qui suspendait ma vie !
J’aurais voulu, souvent, pâle d’anxiété,
Echapper par la fuite à ma félicité.