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Je ne l’aurai du moins maudite qu’une ibis :
Et toi, tu la maudis toujours, ou tu le crois.

Je sais bien où j’irai, si tu deviens parjure :
Mais pourquoi de si loin creuser sa sépulture ?
Peut-être qu’en moi-même exilé par l’ennui,
Je pleurerai demain les heures d’aujourd’hui ;
Demain ! toujours demain ! pourquoi, d’un œil avide,
Éveiller l’avenir dans son chaos aride !
Oh ! qu’il dorme ! qu’il dorme ! embrassons le présent.
Je n’attends du destin ni faveur ni présent :
L’espoir a peu de part à mes rêves d’aurore,
Sans en changer la nuit l’illusion les dore :
Le monde, aux cris jaloux, peutencor m’attrister :
Mais n’ayant rien à perdre, on ne peut rien m’ôter ;
Je ne vis pas : je dors, en attendant la vie.
Pourquoi m’inquiéter des efforts de l’envie,
Et vouloir mettre un frein aux coursiers du hasard’?
. Qu’ils marchent le réveil peut arriver bien tard.
Où vont-ils ? à la gloire ? au combat ? que m’importe !
Le remèdeest toujours prèsdes maux qu’on supporte :
Le pays, où l’on tue, est toujours près de nous.
Oh ! laisse-moi long-temps rêver à tes genoux !
A mes illusions n’oppose plus tes doutes :
Quand on sait s’en guérir, on peut les garder toutes.