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Tout ce que je craignais, c’est qu’un cri d’hirondelles,
En réveillant les flots, ne fit rouvrir tes ailes,
Et de te voir, fuyant vers un monde plus doux,
Dans mon bateau désert m’oublier à genoux.
C’était alors, ô Mort, qu’ouvrant ta froide source,
Il fallait de mes jours y replier la course,
Et fermer l’avenir à mes pas soucieux ;
Que j’aurais emporté de bonheur dans les cieux !



Me voilà, penses-tu, bien loin de l’hérésie,
Qui m’a fait renier la sainte poésie ?
Pas si loin que tu crois. Seuls parmi les humains,
Nos plus beaux jours de fête ont d’amers lendemains.
Toujours, pour l’enlaidir, repassant son histoire,
Le poète ici-bas a seul de la mémoire ;
Et l’esprit veut en vain en colorer les traits :
Les plus beaux souvenirs ne sont que des regrets.
Aujourd’hui cependant, aujourd’hui que je t’aime,
Je croirai que la lyre est un présent suprême :
Oui, c’est un don divin, qu’on ne peut trop vanter,
Quand le Dieu, qui l’a fait, nous aide à le porter.
Oh ! ne me quitte pas !, je dirai : La nature
De celle que j’admire a pour moi la parure :
La nature est plus belle aujourd’hui qu’autrefois,
Une voix, pour le dire, est mêlée à ma voix :