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Et semblait à lui seul son royaume incarné,
Se soit de son malheur assez découronné,
Pour présenter deux fois requête à l’Angleterre ;
L’empereur Thémistocle eût bien fait de se taire.
Qu’il a fallu souffrir, pour descendre si bas !
Bonaparte, qui prie, et qu’on n’écoute pas !
On soufflette son nom, à défaut de s i joue.
A compter ses griefs c’est en vain qu’il s’enroue :
On trouve que César commence à rabâcher.
Au fait, se dit l’Anglais, qu’a-t-il à pleurnicher ?
Se croit-il en prison, afin qu’on le régale,
Qu’il rechigne au pain sec, comme un Sardanapale ?
Sous un climat rongeur il se sent dépérir !
Quand on est le plus faible, on a tort de mourir :
Et, les lords entendus, un bill du ministère
Erige Sainte-Hélène en pays salutaire.
Pauvre Napoléon ! mieux eût valu, pour toi,
Quelque niche au Spielberg, que celle où je te voi.
Plongé dans un cloaque, enchaîné sur la paille,
Remportant sur le sort sa dernière bataille,
Il eût été plus grand qu’aux jours de ses tournois,
Quand, ne pouvant marcher, sans heurter quelques rois,
Il essuyait sa botte après leur diadème.
Sa gloire eût dominé sa disgrâce suprême :
Mais combien est mesquin cet état frelaté,
Qui tient de l’esclavage et de la liberté,
Ce terme mitoyen entre un sceptre et des chaînes !
Il est là sur son roc, comme ces phénomènes,