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II.
LA TEMPÊTE.

Me voilà donc parti ! Fier d’oublier le port,
Mon vaisseau, balancé par un souffle du nord,
Arrondit de ses mats la parure flottante ;
Aux champs napolitains il emporte ma tente.
Comme un dernier ami qui nous fait ses adieux,
Le rivage embrumé se dérobe à nos yeux.
La mouette, qui joue à côté du navire,
Suspend son vol mouillé, s’éloigne, se retire :
La terre a disparu. Les rayons du soleil,
Enveloppant la mer de leur réseau vermeil,
Font courir à fleur d’eau leur dentelle de nacre.
Du vaisseau baptisé, que Sainte-Anne consacre,
La hune retentit de joyeuses chansons.
L’Océan, dont la brise agite les frissons,
Se creuse autour de nous en grottes ondoyantes :
Comme un tapis soyeux, les \agues tournoyantes,
Tantôt vers mon esquif courent à plis légers :
Tantôt, frêles volcans, leurs sommets passagers
Jaillissent en flocons, dont la riche poussière
Fuit en laves d’argent, qu’embrase la lumière.