Souvent même on se tait, pour se faire comprendre.
Mais, quand les yeux craintifs ne peuvent rien apprendre,
Comment représenter ce qu’on n’exprime pas !,
Que Dieu ne daigne-t-il éveiller sous nos pas
Une langue électrique, adroite, et nuancée,
Et qui, par tous les sens, attaquant la pensée,
Nous prodigue des mots, prompts à tout figurer,
Qu’on puisse entendre, voir, toucher et respirer !
Eh ! qui sait si le ciel n’a pas, sous nos bocages,
De nos désirs rétifs dispersé les images :
Si, choisissant pour eux un écho dans les fleurs,
On ne se répond pas, en mêlant leurs couleurs !
Firmament végétal, qui sait si nos parterres
N’ont pas, exprès pour nous, combinant leurs mystères,
Sur l’émeraude, éparse en tapis transparent,
Brodé de nos secrets un miroir odorant,
Un livre où chaque jour les âmes, qu’on délaisse,
Peuvent, sans en souffrir, feuilleter leur tristesse,
Page:Lefèvre-Deumier - Confidences, 1833.djvu/64
Cette page n’a pas encore été corrigée