Page:Lefèvre-Deumier - Confidences, 1833.djvu/390

Cette page n’a pas encore été corrigée

Dorant déjà la coupe, où je puise l’espoir,
Je passe ma journée à m’occuper du soir.

Sans doute, et je le sais, tout cède à l’habitude,
Tout, excepté nos maux, s’use avec promptitude ;
Et quand j’aurai perdu ce magique sommeil,
Qui, sur mon ciel nocturne évoquant le soleil,
Des diamans du prisme a jonché mes nuages,
Il me faudra rentrer dans mon linceul d’orages ;
Mais jusque-là du moins je ne souffrirai pas.
Puis le temps va toujours, changeant tout sur ses pas :
Bienfaiteur glacial, l’âge, avant la sagesse,
Peut, sans qu’on l’aperçoive, emporter la tristesse,
Et la sagesse aussi, tandis que nous dormons,
De nos cœurs, qu’elle entr’ouvre, assoupir les poisons.
Vous dont l’ame souffrante, ayant vu comme on aime,
Ne sait plus où poser le fardeau d’elle-même,
Quittez donc, comme moi, la terre où vous pleurez.
Courbons sous les pavots nos fronts désespérés,