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Si jamais, lui disais-je, en mon jaloux effroi,
Tu relis, Maria, cette scène sans moi,
Réveille, par pitié, l’heure alors assoupie,
Où mon burin pensif t’en gravait la copie.
Du soir de Lauterbrunn, que je n’oublîrai pas,
Rappelle-toi l’orage oublié dans mes bras,
Et si ces vers sonnans, dont ta jeune paresse
Ne veut pas bégayer l’indigène richesse…
Hélas ! la scène existe, elle est là, sous mes yeux,
Le témoin d’un bonheur remonté dans les cieux ;
Le monde où je la lis craque encor sous la foudre,
Dont la meule de feu semble vouloir le moudre :
Mais ce n’est que pour moi que la foudre et les vers
Ont les mêmes accens et les mêmes éclairs.
Les mêmes ! non, mon cœur, flétri par le parjure,
Change aussi, Maria, de rôle et de nature.
L’amour, comme un remords, m’a dégradé le sein :
Je reconnais mes traits dans ceux de l’assassin,