Quel singulier pouvoir que celui de l’amour,
D’attirer tout à lui pour y mêler son jour !
Soleil vivifiant, sa lumière féconde
Transforme, en y tombant, les nuages du monde,
Et semble, en brouillard d’or, à nos yeux dérouler
Les poudreuses vapeurs qui pourraient la voiler.
Ainsi dans cette scène, à l’amour étrangère,
Je trouvais à glaner sa lueur passagère :
Je croyais me sentir, d’un tyran délivré,
Savourer dans ces vers un air régéneré :
J’élevais sur leur base un val imaginaire,
Où, mêlant de nos jours la source sédentaire,
Et d’un soleil commun partageant la chaleur,
Une Hedwige, avec moi, respirait du malheur.
La base existe encor : mais ce séjour magique,
Qui naissait sous ma lyre, hélas, peu prophétique !
Plus vite que ses chants il s’est évaporé :
Le souffle de l’absence a tout défiguré.
Excepté moi, qui pleure aujourd’hui ces chimères,
Qui peut se rappeler leurs ombres éphémères ?
Page:Lefèvre-Deumier - Confidences, 1833.djvu/328
Cette page n’a pas encore été corrigée