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Les prés étaient plus verts, et les arbres plus beaux,
Et les airs, ce me semble, avaient bien plus d’oiseaux.
La nature, à cet âge, étincelle de charme,
Chaque idée, en passant, nous emporte une larme ;
On essaie, on choisit vingt sentiers à la l’ois,
Et le plaisir dans tous éparpille sa voix.
On croit sur son génie assurer sa mémoire,
On assigne une forme aux rêves de la gloire,
Les serres de l’amour étreignent sans douleur,
Même en pleurant l’espoir a les traits du bonheur.
Plus tard, sans la choisir, on a reçu sa route :
Le peu que vaut la gloire, et le prix qu’elle coûte,
On le sait : le dégoût a mis sur nous la main :
La moitié de nos nœuds s’est rompue en chemin,
Ceux qu’on voudrait former deviennent impossibles,
Et le cœur sillonné de rides invisibles,
Vieux, sans être un vieillard, l’esprit chauve et muet,
On s’avance, isolé, vers ce terme inquiet,
Qui nous promet de loin un repos dont on doute.
Quand on souffre, la mort ne vient que goutte à goutte.