Mais tu n’es pas le seul, indigent conquérant,
Qu’on voie aller, si loin d’un monde indiffèrent,
Récolter des trésors payés par l’agonie.
N’est-il pas comme toi, celui dont le génie
Plonge, pour nous instruire au fond des passions,
Ou qui, dans les tombeaux des vieilles nations,
Poursuivant à grands frais quelque heureuse richesse,
En revient amuser notre avare paresse ?
N’est-il pas comme toi, le poète ignoré,
Qui, dans sa sphère à part végétant inspiré,
D’une cour sans sujets monarque solitaire,
Sème, sans en jouir, ses perles sur la terre.
Il consume sa vie à son propre flambeau :
Sa clarté ne lui sert qu’à mieux voir son tombeau.
Ses chants aux cœurs blessés apporte le dictame :
Quels regards, quand il souffre, interrogent son âme ?
Aucun. Si dans ses vers, tout mouillés de ses pleurs,
Il attiédit en nous nos foyers de douleurs,
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