Tout change sur les bords de ce fleuve où nous sommes,
Les arbres, les gazons, les oiseaux, et les hommes,
Mais lui ne change pas : le bruit de ses roseaux,
Demain, comme aujourd’hui, frappera les échos :
Et nous qui, chaque soir, déserteurs des rivages,
Lui donnons à bercer nos doux pélerinages,
Pourquoi, plutôt que lui, nous verrait-on changer,
Nous, qu’à le parcourir il semble encourager,
Vous, dont l’âme limpide est encore plus pure,
Moi, qui n’ai qu’un amour, comme il n’a qu’un murmure !
Qu’un nuage, en ces flots, vienne à se retracer,
Comme l’eau, qu’il noircit, il est prompt à passer :
Puis son vol orageux n’est pas toujours si sombre,
Et c’est toujours de loin qu’il y jette son ombre.
Cette menace meurt, mais dans son lit d’aimant
Le cristal constellé garde le firmament ;
Dieu semble, de son front y semant l’auréole,
Balancer sa richesse autour de ta gondole.
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