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premières poésies



LXII



UNE PENSEE[1]


À mon ami Jules Rouffet.
« Et, depuis, le malheur a jeté sur son seuil,
Comme une ombre du soir sa tenture de deuil. »
(Charles Castellan.)


Je vous ai, par hasard, rencontré dans la vie.
Nos routes se croisaient. L’amitié poursuivie
Par nos rêves, assise au détour du chemin,
Quand nous vînmes, nous prit et nous joignit la main.
Puis alors, entr’ouvrant nos âmes inquiètes,
Elle dit nos espoirs et nos peines secrètes,
Et cet épanchement nous fit les jours meilleurs,
Car il est doux de croire à d’intimes douleurs.
Merci d’être venu : je le sentais, mon âme
Demandait à chacun un rayon de sa flamme,
Elle avait un désir vague d’émotion,
Comme un pressentiment d’une sensation

  1. Cette pièce ne se trouve évidemment pas à la place qu’elle devrait occuper, par ordre de date. Elle eût pu figurer en tête du recueil. Nous l’avons renvoyée ici, parce qu’elle résume et conclut à merveille cette correspondance.