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LA VIGNE DE NABOTH.


Mon Seigneur lui dira : Qu’ai-je fait, sinon rien ?
A-t-on trouvé ma main dans ce meurtre, ou mon signe ? —
Akhab, en souriant, dit : — Ô femme, c’est bien !

J’aurai le sang de l’homme et le vin de sa vigne ! —


II


Vers l’heure où le soleil allume au noir Liban
Comme autant de flambeaux les cèdres par les rampes,
Les Anciens sont assis, hors des murs, sur un banc.

Ce sont trois beaux vieillards, avec de larges tempes,
De grands fronts, des nez d’aigle et des yeux vifs et doux,
Qui, sous l’épais sourcil, luisent comme des lampes.

Dans leurs robes de lin, la main sur les genoux,
Ils siègent, les pieds nus dans la fraîcheur des sables,
À l’ombre des figuiers d’où pendent les fruits roux.

La myrrhe a parfumé leurs barbes vénérables ;
Et leurs longs cheveux blancs sur l’épaule et le dos
S’épandent, aux flocons de la neige semblables.

Mais leur cœur est plus noir que le sépulcre clos ;
Leur cœur comme la tombe est plein de cendre morte ;
L’avarice a séché la moelle de leurs os.