Page:Leconte de Lisle - Poèmes barbares.djvu/143

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
133
LE MASSACRE DE MONA.

Et tous, indifférents aux atteintes mortelles,
Ne cessaient qu’à l’instant où l’âme ouvrait ses ailes.
Les arcs tintaient, les traits s’enfonçaient dans les flancs,
Sans trêve, hérissant les dos, les seins sanglants,
Déchirant, furieux, la gorge des prêtresses
Dont la torche fumante incendiait les tresses.
Et tout fut dit. Quand l’aube, en son berceau d’azur,
Dora les flots joyeux d’un regard frais et pur,
L’Île sainte baignait dans une vapeur douce
Ses hauts rochers vêtus de lichen et de mousse,
Et, mêlant son cri rauque au doux bruit de la mer,
Un long vol de corbeaux tourbillonnait dans l’air.