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femme sa fille Thémistonoiè aux yeux bleus. Lâche ! Arès n’écartera point la mort loin de toi, si nous nous heurtons dans le combat. Déjà, en effet, je pense qu’il a éprouvé ma lance, quand, furieux et insatiable, [360] il me combattit dans la sablonneuse Pylos. Trois fois atteint par ma lance, il tomba contre terre, le bouclier rompu ; et, la quatrième fois, je lui perçai la cuisse en l’accablant de toute ma vigueur, et il tomba la face dans la poussière sous le choc impétueux de ma lance. Et, ainsi déshonoré parmi les Immortels et dompté par mes mains, il me laissa ses dépouilles sanglantes.

Il parla ainsi, mais Kyknos habile au combat ne voulut pas céder à sa demande, et détourner les chevaux qui traînaient son char. [370] Et, alors, du haut de leurs chars bien construits sautèrent promptement à terre le fils du grand Zeus et le fils du roi Arès ; et les deux conducteurs des chars poussèrent les uns contre les autres les chevaux aux belles crinières, et, sous leurs pieds trépignants, la vaste terre trembla.

De même que, du haut sommet d’une grande montagne, des rochers roulent et bondissent en tombant, et que leur chute irrésistible rompt les chênes aux feuillages élevées et les pins nombreux, et les peupliers aux racines profondes qui roulent jusque dans la plaine, ainsi, avec de hautes clameurs, les deux guerriers se rencontrèrent. [380] Et toute la ville des Myrmidones, l’illustre Iaôlkos, et Arnè, et Hélikè, et l’herbeuse Anthéia, retentirent des clameurs des deux guerriers tandis qu’ils se heurtaient. Et le sage Zeus tonna fortement et fit pleuvoir des gouttes de sang de l’Ouranos pour donner à son brave fils le signal du combat. De même que, dans les gorges d’une montagne, un sanglier farouche aux dents recourbées, plein du désir furieux de combattre des chasseurs, aiguise ses