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qu’il possède la grandeur et la force des Kyklôpes, ou qu’il puisse vaincre en rapidité le Thrèkien Boréas, ou qu’il soit plus beau que Tithôn, plus riche que Midéas et Kinyras, plus puissant que le Tantalide Pélôps, plus éloquent qu’Adrastès, ou doué de toute autre gloire, s’il n’a en partage la vertu guerrière.

Ce ne sera pas un homme brave au combat, s’il ne soutient point la vue du carnage ensanglanté et s’il n’aborde point l’ennemi face à face. Cette vertu est la meilleure de toutes, et c’est elle qui illustre le plus les jeunes hommes.

C’est un grand bien pour une ville et pour un peuple qu’un homme combatte fermement au premier rang, oublieux de la fuite ignominieuse, opposant sa vie et son âme au danger, et encourageant son compagnon à affronter la mort. Celui-là est un homme brave au combat. Il met promptement en fuite les terribles phalanges ennemies, et, par son courage, il règle la destinée de la bataille.

Si, tombé au premier rang, il perd la vie, il glorifie sa ville et son peuple et son père ; sa cuirasse, son bouclier et sa poitrine sont percés d’innombrables coups ; et tous le pleurent, jeunes hommes et vieillards ; les regrets de sa ville le suivent, et sa tombe, et ses enfants, et ses petits enfants, et ses descendants sont illustres parmi les hommes. Jamais sa gloire fameuse ne périt, ni son nom, et, bien qu’il soit sous terre, il reste immortel, celui qui a bravement combattu pour sa patrie et pour ses enfants, et que le violent Arès a tué.

Et s’il échappe au long sommeil de la mort, s’il remporte la gloire éclatante du combat, tous l’honorent, jeunes et vieux, et il descend chez Aidès, couvert d’honneurs. En vieillissant, il est le premier parmi les citoyens,