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tendre ; vous n’en manquerez pas, car elle repoussera. Ici ! Paissez, paissez ! Et, toutes, remplissez vos mamelles afin que les agneaux s’abreuvent de lait, et que j’en mette encore dans les éclisses.

Et Daphnis, à son tour, commença de chanter harmonieusement.

daphnis.

— Une jeune fille aux sourcils arqués m’ayant aperçu du seuil de l’antre, comme je paissais mes génisses, m’a dit deux fois que j’étais beau ; mais je n’ai rien répondu, pas même une parole piquante, et, baissant les yeux, j’ai suivi mon chemin. La voix et l’haleine de la génisse sont douces ; il est doux, l’été, de reposer en plein air auprès d’une eau courante. Les glands ornent le chêne, les pommes le pommier, les génisses la vache, et la vache elle-même le bouvier.

Les enfants ayant chanté, le chevrier parla ainsi : — Ô Daphnis, ta voix et ta bouche sont douces ! Il est meilleur de t’entendre chanter que de boire du miel ! Prends la syrinx, car tu as vaincu. Si tu veux m’enseigner quelque chanson, tandis que je garderai mes chèvres auprès de toi, je te donnerai en retour cette chèvre sans cornes qui remplit toujours à déborder le vase où on la trait.

Et l’enfant Daphnis se réjouit, battit des mains et sauta de même qu’un faon vers sa mère, parce qu’il avait vaincu ; mais l’autre, confus et rongé de chagrin, était triste comme une vierge qui se marié.

Dès lors, Daphnis fut le premier parmi les pasteurs ; et, bien que tout jeune encore, il épousa la nymphe Naïs.