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Cours-tu vers le pressoir de quelque habitant de la ville ? Tu marches vite, et tes chaussures heurtent la pierre, qui résonne.

Et je lui répondis :

— Ami Lykidas, chacun dit que tu es un excellent joueur de syrinx entre tous les pasteurs et les moissonneurs ; et mon cœur s’en réjouit, bien que j’aie l’espoir de t’égaler. Or, nous allons aux Thalysies, où deux de nos amis font un sacrifice à Damatèr au beau péplos, et lui offrent les prémices de leur richesse, car elle a abondamment pourvu leurs granges d’orge. Donc, puisque notre route est la même et que le même jour nous luit, chantons une chanson pastorale. Peut-être que l’un de nous fera plaisir à l’autre. Car moi aussi, je suis une des bouches sonores des Muses ; et l’on dit que je chante admirablement. Mais je ne suis pas crédule, non certes ! et je ne crois surpasser ni l’irréprochable Sikélidas de Samos, ni Philètas. Je ne lutterais contre eux que comme la grenouille contre les cigales.

Je parlais ainsi à dessein ; mais le chevrier me sourit : — Je te donne ce bâton pastoral, dit-il, parce que tu es un vrai fils de Zeus, fait pour la vérité. Je hais grandement l’architecte qui tente d’élever une demeure digne d’Oromédôn, haute comme une montagne, et je hais ces oiseaux des Muses qui s’épuisent à pousser des cris injurieux contre l’Aoide de Khios. Allons, Simikhidas, commençons à l’instant les chants bucoliques. Vois, ami, si cette petite chanson que j’ai faite dernièrement te plaît :

— Qu’elle soit heureuse la navigation d’Agéanax vers Mitylana, même quand le Notos chasse les flots écumeux sous les Chevreaux inclinés à l’Occident, et quand Oriôn trempe ses pieds dans la mer, si Agéanax guérit Lykidas brûlé par Aphrodita, car l’ardent Érôs me consume.