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IDYLLE III



Le Chevrier ou Amaryllis



Je chante Amaryllis, et mes chèvres paissent sur la montagne, et Tityros les mène. Tityros, mon bien-aimé, fais paître les chèvres et mène-les à la source ; mais prends garde que le bouc blanc Libyen te frappe de ses cornes.

Ô belle Amaryllis, pourquoi, penchée pour regarder, au seuil de cet antre, ne me nommes-tu plus ton jeune ami ? Me hais-tu ? Serait-ce, ô Nymphe, que de plus près je te semble camus et barbu ? Tu feras que je me pendrai !

Tiens, je t’apporte dix pommes ; je les ai cueillies là où tu m’as dit de les cueillir, et, demain, je t’en apporterai d’autres. Vois au moins ma douleur cruelle. Ah ! que ne puis-je, abeille bourdonnante, à travers le lierre et la fougère, pénétrer dans l’antre où tu te caches !

Maintenant je connais Érôs. C’est un Dieu accablant. Sans doute il a sucé la mamelle d’une lionne, et sa mère l’a nourri dans une forêt. Il me consume jusqu’au fond des os ! Hélas ! malheureux, que vais-je encore souffrir ? M’entends-tu seulement ?

Je dépouillerai mon vêtement de peau, et je me jetterai dans l’écume où le pêcheur Olpis guette les thons ; et, si je meurs, je te serai au moins agréable en cela.