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si tu m’avais repoussé, si ta porte avait été close au verrou, les haches et les torches m’eussent frayé un chemin vers toi !

Apprends d’où me vint mon amour, vénérable Sélana ! — Et, maintenant, je suis reconnaissant à Kypris, et, après elle, à toi, ô femme, qui m’as arraché du feu et m’as appelé lorsque j’étais à demi consumé ; car Erôs allume souvent une flamme plus ardente que n’en allume Haphaistos de Lipara.

Apprends d’où me vint mon amour, vénérable Sélana ! — Les livrant à d’âpres fureurs, il arrache la vierge de sa chambre et l’épouse du lit encore chaud de l’époux. Il parla ainsi, et moi, crédule, je lui pris la main et je le fis coucher sur le lit moelleux ; et nos corps enlacés et nos visages s’échauffèrent, et nous murmurions doucement. Enfin, chère Sélana, les mystères s’accomplirent, et tous nos désirs furent exaucés. Et depuis nous avons été heureux l’un par l’autre. Mais, aujourd’hui, la mère de Philista, la joueuse de flûte que j’aime, et de Mélixô, est venue à moi, vers l’heure où les cavales d’Aôs aux bras couleur de rose l’emportaient de l’Okéanos dans l’ouranos ; et, entre autres choses, elle m’a dit que Delphis était amoureux, soit d’une femme, soit d’un homme, car elle ignorait ceci ; mais qu’il emplissait sa coupe d’un vin pur pour boire à son amour, et qu’il était parti, disant qu’il allait orner de guirlandes la maison qui l’attire. Cette femme m’a dit cela, et elle a dit vrai, car, jadis, il venait me voir trois ou quatre fois par jour, laissant chez moi son flacon dorien, et voici que je ne l’ai point vu depuis douze jours. C’est qu’il cède à d’autres désirs et que je suis oubliée.

Maintenant, je l’enchanterai avec des philtres, et, s’il m’outrage encore, oui ! par les Moiresl il frappera à la